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Mieux connaître nos auteurs : Patrice Woolley

Dernière mise à jour : 21 mai 2023


Ni dogme, ni langue de bois. Sans masque ni fard. Une bonne préparation à la lecture de "Je t'Haine".


1. Quelques mots sur vous et votre parcours ?


Un parcours de curieux. Même si ma première passion artistique fut la bande dessinée, j’ai été amené très vite à m’intéresser au théâtre (au jeu d’abord, puis aux décors, aux éclairages), ensuite la musique. C’était pour moi des terrains de jeu où je pouvais vivre d’autres vies ! La vie réelle m’a toujours un peu emmerdé. Quand je jouais Caliban, Trigorine ou Caligula, j’étais ces personnages ! Quand je dessinais des héros dans l’espace, j’étais ces personnages. Ce fut moins vrai pour la musique (très rock au début et dans un groupe) car je n’écrivais pas encore de chansons, et je ne composais pas encore, je n’étais que chanteur. L’écriture est venue bien plus tard, vers la quarantaine, je ne me sentais pas légitime. Mais le succès de ma BD Ténèbres m’a donné envie d’essayer. Je me suis dit que si j’étais capable d’écrire de la BD, je pouvais sans doute écrire des romans. De là, est arrivée l’envie de faire du cinéma, d’écrire des scénarios, de réaliser des films… Je suppose que c’est la suite logique. Et 20 ans après, je passe d’un art à l’autre selon mes envies, mes idées, avec bonheur et plaisir, mais je ne fais toujours que ce que je sais faire ! Je ne danse pas, je ne sculpte pas (ou très mal) et je suis une tanche en son.


2. Parlez nous de votre livre.


C’est toujours très difficile pour moi de parler de ce que j’ai fait. D’abord, parce que dans ma tête je suis déjà passé à autre chose, et ensuite parce que je n’ai jamais su me vendre… Pour résumer,

JE T’HAINE ne parle pas de mon viol vécu dans ma jeunesse, mais il en est la résultante. Mon agression remonte à plus de quarante ans, et mon cerveau, à l’époque a verrouillé l’accès à son souvenir. La nature est bien faite. À l’âge de 54 ans, des bribes d’images, de souvenirs me sont revenus, comme ça, par moment, sans prévenir. J’ai mis un petit moment à comprendre et à accepter, mais sans traumatisme, ni honte ou culpabilité. C’était si loin. Je me rappelle avoir sorti toute l’histoire d’un coup à Montpellier, dans un restaurant, face à ma fille et sa mère qui pensaient que je plaisantais de mauvaise façon. Deux ans après, j’ai commencé l’écriture de JE T’HAINE, sans faire de rapport avec mon expérience. Pour moi, c’était une idée qui venait comme d’autres viennent d’habitude, sans prévenir, sans se forcer. Si on devait analyser ou comprendre à chaque fois d’où viennent nos idées créatrices, on ne ferait rien, ou on le ferait mal. J’ai voulu comprendre, me mettre à la place d’un violeur sans le juger ni en faire un héros, juste le voir vivre de l’intérieur. Le théâtre me permet depuis toujours de « vivre » mes personnages d’écriture, ça me permet (je pense et espère) d’être juste, vrai et/ou cohérent, mais j’avoue avoir fini le roman émotionnellement sur les rotules. Ce n’est qu’un an après que j’ai compris d’où venait cette idée de roman, c’était en phase avec mes souvenirs de viol ; comme une réponse, une envie de comprendre, d’évacuer. Depuis, des détails me reviennent encore, infimes, sporadiques. Je vis avec, c’est passé, fini, mais ça fait partie de moi ; et le roman est là !



3. Quelles sont vos lectures, influences ?


Tout et n’importe quoi, serai-je tenté de dire. Depuis gamin, j’ai toujours eu un livre en main, BD ou autre. À 14 ans, je lisais des bouquins d’astrophysique, d’archéologie, dont je ne comprenais qu’un quart, mais je lisais. Le livre c’est charnel, son odeur, ses pages, sa taille, tout lui confère une place unique dans nos mains, dans nos cœurs et nos souvenirs. Il me suffit de rouvrir certains vieux bouquins, pour qu’à l’odeur je me retrouve à l’époque où je le lisais, décors, moments, sensations, tout. Beaucoup de BD aussi, des romans, Bukowski, Lovecraft, Tourgueniev ; puis énormément de texte de théâtre, Aristophane, Genet, Shakespeare, Tchekhov, Euripide, Gogol, Jarry, Camus… L’Étranger de Camus étant un marqueur fort, et le reste encore aujourd’hui. Je lis moins, moins de temps ; trop de projets, mais je trouve parfois un moment. Les derniers étant les biographies d’Obama, de Keith Richards, et beaucoup de bouquins sur le cinéma, de Kubrick à Burton. Les influences ? Dur à dire, sans doute un mélange de tout ce que j’ai vu, écouté, lu, vécu…


4. Quels sont vos nouveaux projets en cours ?


Démarcher des projets de films et série TV, finir un album de chansons Pop-Rock du nom de FREEDOM, finir les quelques romans que j’ai sur le feu, en démarcher d’autres. Après le Covid, j’ai deux maisons d’éditions qui ont hélas fait faillite, et je me retrouve avec quelques romans orphelins. Continuer à sortir un album instrumental tous les six mois, avec les clips, me remettre à la BD, et accessoirement, vivre…


5. Ecrire : pourquoi ?


Pourquoi pas ?... Plus sérieusement, comme je l’ai dit plus haut, c’est venu avec le temps. Et puis le plaisir de se lâcher. Je me lâche bien plus en écriture que dans toute autre forme d’art. L’écriture est un puissant et pernicieux piège. C’est, pour moi, le seul medium où je suis le plus ce que je suis, ou je me livre le plus. En BD, en musique, au théâtre, on est derrière, en filigrane, on joue, on interprète, on triche, on camoufle, on ment. Dans l’écriture, même si on essaie de mentir, de travestir, le MOI revient toujours par une porte dérobée. Il y a dans chacun de mes personnages d’écriture, un peu de moi, sans le vouloir. L’écriture est l’art le plus exhibitionniste qui soit, et c’est souvent lui qui dirige.


6. J’ai 18 ans, quel conseil voulez-vous me donner pour la vie ?


Une réelle responsabilité de répondre à cette question… D’abord dire qu’à part le changement climatique qui est le défi de ce siècle, pour le reste, l’humanité n’a pas beaucoup changé ni évolué, sauf technologiquement. Il y a toujours les mêmes guerres, les mêmes connards au pouvoir, les mêmes cataclysmes et autres pandémies, de ce côté-là pas trop de changement, l’époque n’est ni meilleure, ni pire, excepté le climat ! Donc, je dirai : ne jamais s’excuser d’être ce que l’on est, ne jamais se laisser faire, rester libre le plus souvent possible, rester fidèle à ses convictions, ne jamais laisser tomber ses rêves et ne faire les choses, si possible, QUE par plaisir !


7. Un fait d’histoire important ou qui vous a marqué ?


Contrairement à beaucoup, ce n’est pas le 11 septembre, mais plutôt la chute du mur de Berlin, moins spectaculaire mais plus important pour moi au vu de la direction sournoise que prend ce monde. Non content d’avoir inventé des dieux pour s’asservir et asservir (plus de 5000 dieux recensés depuis l’aube du monde), d’avoir inventé le temps, d’avoir inventé des frontières imaginaires, il pousse l’indécence à ériger des murs entre les hommes. C’est ce qu’il y a de plus inique, de plus contraire à la fraternité, à l’humanité même. On voit hélas dans certains pays d’autres murs s’ériger, aux USA, en Israël et quelques autres… l’homme se renferme sur lui au lieu de s’ouvrir à l’autre ; on a dû louper quelque chose en chemin… La chute du mur de Berlin reste donc d’actualité et devrait servir d’exemple, et reste pour moi, un fait d’histoire important. Je rajouterai aussi la bataille des Thermopiles qui permit à la démocratie d’éclore et de perdurer.


8. Un pays, un peuple ?


La Grèce, pour la démocratie et ses œuvres, ses mythes. En parlant de la Grèce, je ne saurai recommander le sublime film de Costa Gavras, "Adults in the Room", ou l’on comprend parfaitement comment fonctionne l’Europe ; à savoir : de manière cynique. Et sinon, l’Irlande, juste parce que c’est mon pays d’origine, que c’est un pays doté d’un folklore et de légendes merveilleuses, d’une musique qui me prend au corps, que c’est une terre rebelle, parfois violente mais toujours vivante. Et je n’y suis toujours pas allé, dans aucun de ces pays… misère…


9. Vous auriez aimé vivre à une autre époque que celle-ci ? Si oui, laquelle ?


Je dirai avant le Christ ! Une époque où il y avait peu de monde… Mais quand même dans un pays où il fait chaud, certainement autour de la méditerranée, j’ai toujours besoin de voir la mer.


10. Une passion ?


L’Art, sous toutes ses formes !


11. Un livre sur une île déserte, lequel ?


Sans hésitation : L’Étranger de Camus


12. Un « coup de gueule » ?


Si seulement il n’y en avait qu’un… tous mes coups de gueule sont souvent dans mes romans, dans les dires de certains personnages. Je me suis surpris à en pousser de gros dans les prochaines chansons qui vont sortir de l’album FREEDOM. C’est la première fois que je me fais avoir artistiquement par mes émotions. J’étais parti pour faire un album joyeux, gai, et je me retrouve avec un album de chansons engagées sur la politique, les migrants, le climat, les différences… L’artiste est une éponge, au sens non alcoolique du sens, je précise. Mais si j’en avais un à pousser, ce serait contre l’abêtissement général, le nivellement par le bas que nos sociétés effectuent depuis bientôt 30 ans. Le manque de culture, et/ou sa censure sont les pires choses qui puissent arriver à une société dite civilisée. Je ne sais si je peux le dire ici, mais le roman JE T’HAINE m’a été refusé par d’autres maisons d’éditions sur le simple fait que ça parlait de viol. L’autocensure et la peur de déplaire s’insinuent… Jamais le monde d’Orwell n’a été aussi proche. Et ça, oui, ça m’emmerde !


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